
SAF ? SAFour ? Chaudron ? Potasse ? C’est quoi tout ça ?!
SAF, SAFour, chaudron, potasse.
Voilà d’étranges termes sur lesquels vous êtes déjà tombé en faisant vos recherches sur la fabrication de savon. Et ces mots vous laissent bien perplexe !
Vous avez peut-être compris qu’ils sont liés à la fabrication du savon, mais vous ne voyez pas bien ce qui se cache derrière chacun de ces noms. Et du coup, cela vous empêche de bien comprendre certaines choses que vous lisez !
Je vous propose tout de suite de démystifier ces trois termes afin qu’ils soient pour vous aussi limpides que du cristal.

Sommaire ↪
La saponification
Avant de parler de SAF, SAFour, potasse et chaudron, il me faut faire un petit rappel sur la saponification car ces mots mystérieux sont liés à cela.
J’ai expliqué plus en détail dans cet article que la saponification est le nom de la réaction chimique qui crée le savon.
Dans notre cas, on mélange ensemble des huiles et de la soude caustique et pouf ! Ça déclenche une réaction de saponification qui crée du savon en consommant ces deux ingrédients.
Ce qu’il faut savoir, c’est que cette réaction de saponification peut être réalisée soit sans chauffer les huiles et la soude qui la composent, soit en les chauffant.
Et c’est précisément de ces différences de chauffer / pas chauffer que viennent les termes de SAF, SAFour et chaudron : ce sont trois méthodes de saponifications différentes.
SAF, pour saponification à froid
SAF signifie saponification à froid.
C’est donc une méthode pour réaliser du savon (pour faire une saponification) sans chauffer les ingrédients.
C’est probablement celle que vous verrez le plus souvent sur internet. Elle consiste simplement à mélanger ensemble les huiles et la soude jusqu’à la trace, puis à verser la pâte à savon dans le moule.
Avantages de la SAF
- C’est la méthode la plus simple : vous n’avez pas besoin de vous préoccuper de température, ou d’avoir de matériel relatif à la chauffe.
- Cette méthode permet facilement de faire une multitude de marbrages et d’incrustations.
- Vous pouvez aisément avoir une trace fine, ce qui rend la mise en moule facile.
- Apparence (là c’est subjectif) :
- vous pouvez éviter la phase de gel (un changement visuel du savon dû à sa montée en température naturelle pendant la saponification)
- le savon final a un aspect plutôt lisse, contrairement au savon au chaudron
Limitations de la SAF
- La saponification va mettre plusieurs semaines pour se réaliser entièrement : il faut donc être patient et attendre 4 à 6 semaines avant de pouvoir utiliser votre savon !
- Sugraisser à la trace avec une huile précieuse est inutile (voir cet article) : cette huile sera saponifiée comme les autres. Vous n’avez donc pas le contrôle de la composition du surgras de votre savon.
- Les odeurs (huiles essentielles ou fragrances) tiennent moins bien : il faut donc en mettre plus. En effet, la soude caustique « détruit » en partie les odeurs.
Chaudron : la saponification à chaud
Ce qu’on appelle chaudron est une méthode de saponification à chaud. Le nom réfère au chaudron traditionnellement utilisé pour chauffer la pâte à savon.
Comme pour la SAF, les huiles et la soude sont mélangées. Puis, dans un chaudron, une mijoteuse ou dans un bain-marie, ce mélange est monté à une température de l’ordre de 90°C pendant une heure environ.
Pourquoi faire cela ?
Hé bien la chaleur accélère les réactions chimiques : elle accélère donc la saponification ! Cela entraîne deux avantages majeurs par rapport à la SAF.
Avantages de la méthode du chaudron
- Au bout des une à deux heure de cuisson, la réaction de saponification est totalement terminée, contrairement à un SAF qui nécessite plusieurs semaines d’attente.
- En théorie, vous pouvez donc utiliser votre savon tout de suite après !
- En pratique, les adeptes du chaudron aiment souvent laisser reposer leurs savons quelques semaines afin qu’ils sèchent.
- Vous pouvez choisir la composition du surgras de votre savon !
- Au bout des une à deux heure de cuisson, la réaction de saponification est totalement terminée : vous pouvez donc à ce moment ajouter des huiles de surgraissage précieuses juste avant de mettre en moule, elles vont rester totalement insaponifiées.
- Les odeurs tiennent parfaitement ! En mettant vos huiles essentielles ou fragrances après la saponification, vous vous assurez d’avoir une odeur bien présente tout en utilisant bien moins de produit.
Limitations de la méthode du chaudron
- La méthode est un peu plus compliquée que la SAF.
- Le chaudron est plus long à réaliser que la SAF, et vous devez être aux côtés de votre préparation pendant toute la durée de la cuisson.
- Il ne permet que difficilement de faire des marbrages ou inserts.
- La mise en moule est plus délicate car la pâte est plus épaisse.
- L’aspect final du savon est plus rustique, moins lisse : de n’est pas un inconvénient mais ça ne plait pas à tout le monde.
SAFour, pour saponification au four
SAFour signifie saponification au four. C’est un nom assez bien trouvé, car il est basé sur « SAF » et assez explicite quant à l’utilisation du four.
Le SAFour est un peu un hybride. Il commence comme un SAF, mais termine au four. C’est donc une saponification à chaud (puisqu’il passe au four), mais plus douce que le chaudron.
Concrètement, vous faites un SAF. Une fois la partie SAF terminée, c’est à dire votre pâte à savon dans son moule, vous allumez votre four à sa plus basse température (généralement entre 40 et 60°C).
Puis vous y enfournez votre moule et le laissez pendant 3 à 4 heures, selon la température (ou environ 2 heures si vous utilisez des moules individuels).
Pourquoi faire ça ?
Comme pour le chaudron, la température élevée accélère la saponification. C’est une technique qui partage donc certains avantages et inconvénients du SAF et du chaudron.
Avantages de la SAFour
- Le SAFour presque aussi simple que le SAF !
- Une fois sorti du four, la saponification est terminée : le savon est donc utilisable immédiatement. Pas besoin d’attendre 4 à 6 semaines comme en SAF !
- Vous pouvez cependant laisser reposer vos savons quelques semaines afin qu’ils sèchent, comme pour le chaudron.
- Vous pouvez faire les mêmes marbrages et inserts qu’en SAF.
- Contrairement au chaudron, vous n’est pas obligé de rester à côté de votre four pendant la cuisson (enfin, jetez quand même régulièrement un oeil la première fois 😉 )
Limitations de la SAFour
- Sugraisser à la trace avec une huile précieuse est inutile (voir cet article) : cette huile sera saponifiée comme les autres. Vous n’avez donc pas le contrôle de la composition du surgras de votre savon.
- Les odeurs (huiles essentielles ou fragrances) tiennent moins bien : il faut donc en mettre plus. En effet, la soude caustique « détruit » en partie les odeurs.
- Elle nécessite quand même quelques connaissances supplémentaires, par exemple pour éviter un effet de volcan (le savon se dilate de sort de son moule) dans le four.
Potasse : le savon naturellement mou et liquide
Vous avez dû le remarquer : faire du savon maison vous fait obtenir un savon dur, une savonnette.
Pourtant, il y a un moyen de fabriquer artisanalement et chez vous du savon naturellement mou (comme le savon noir de hammam), voire liquide (comme un gel douche).
Mais par quelle sorcellerie est-ce possible ?! En un mot : la potasse.
Vous l’aurez compris, pour faire du savon on mélange du gras et de la soude (c’est la saponification). Hé bien en réalité, vous pouvez faire du savon en remplaçant la soude par un autre produit de la même famille chimique : la potasse.
Au lieu de mélanger du gras et de la soude (ou hydroxyde de sodium, NaOH), vous mélangerez du gras et de la potasse (hydorxyde de potassium, KOH). Cela ce fait généralement en saponification à chaud type chaudron, sans quoi la fabrication du savon est vraiment longue. Mais dans tous les cas, le résultat est un savon mou, que vous pouvez diluer dans un peu d’eau pour en faire un savon liquide très stable (pas comme le savon liquide fait à partir de savon dur dilué, qui contient des morceau ou se resolidifie parfois).



Je ne crois pas que vous pouvez acheter de la lessive de potasse comme vous pouvez le faire avec de la lessive de soude. Il va vous falloir faire votre propre lessive de potasse, comme on peut le faire avec de la soude.
Bien sûr, pensez plus que jamais à utiliser un calculateur de recette si vous utilisez de la potasse, car sa quantité nécessaire dans une recette ne se calcule pas tout à fait comme celle de la soude.
Quelle méthode de saponification choisir ?
Je pense que maintenant, SAF, SAFour, potasse et chaudron sont des concepts bien plus clairs pour vous.
Mais alors, laquelle de ces techniques de saponification vaut-il mieux utiliser ?
Comme vous avez pu le constater, chaque méthode à ses avantages et ses inconvénients. Il n’existe donc pas de méthode de fabrication ultime ! Il faut donc choisir selon ses besoins et envies, par exemple :
- Vous êtes et débutant et/ou voulez faire au plus simple ? Une saponification à froid (SAF) est sans doute l’idéal !
- Vous voulez faire un marbrage assez travaillé ou mettre des inserts dans votre savon ? Il vaut sans doute mieux éviter un chaudron et se rabattre sur un SAF ou SAFour.
- Vous souhaitez maitriser la composition du surgras de votre savon ? Alors le chaudron s’impose sans hésitation !
- Vous voulez un savon mou ou liquide ? Un savon réalisé à la potasse est alors peut-être une bonne idée.
En plus de ça, vient aussi la préférence personnelle !
En effet, certains préfèrent la simplicité du SAF, ou l’aspect du chaudron, la texture unique du savon à la potasse, ou encore la polyvalance du SAFour.
Il n’y a pas de bonne ou de mauvaise réponse ! Cela nous rappelle que la savonnerie est une activité créative et qu’il ne faut pas avoir peur de tester toutes ces méthodes afin de voir ce qu’on aime et ce qu’on aime moins.
Alors expérimentez, et faites vous plaisir !
La bise 😉
6 réflexions sur « SAF ? SAFour ? Chaudron ? Potasse ? C’est quoi tout ça ?! »
Merci pour cette article très complet et instructif. Je ne connaissais pas les différences entre ces techniques, vous y avez remédier 🙂
Je n’ai plus qu’à les essayer et voir celle qui me correspond le plus. Encore une fois merci pour votre partage de connaissances.
Avec plaisir, Olivier 🙂 Et bons essais !
Bonjour, j’ai entendu souvent que le fait de « cuire » les huiles détruit en partie leurs propriétés. Du coup, on gagne de pouvoir ajouter des huiles précieuses en surgras, mais on perd en qualité de l’huile de base. Qu’est ce que vous en pensez ?
Bonjour Kathleen,
Mes réponses sont celles de quelqu’un qui n’est pas du tout chimiste.
Mais ma compréhension de la façon dont nous faisons du savon est la suivante : les huiles que nous utilisons pour faire du savon sont justement transformées en savon (elle sont saponifiées). Ce ne sont donc plus des huiles, et elle n’ont plus leurs propriétés d’huiles, puisque ce n’en son plus.
Il reste bien sur la petite fraction du sugras, qui elle reste bien sous forme d’huile. Il peut être intéressant d’utiliser une huile précieuse pour le surgraissage alors, en saponification à chaud (chaudron). Cette dernière permet d’être certain que l’huile de surgraissage reste à 100% sous forme d’huile dans le savon. Puisqu’au contraire en SAF, les expériences montrent que surgraisser à la trace avec une huile précieuse est inutile (voir cet article : https://apprendre-a-faire-son-savon.fr/surgraisser-trace/).
Voila ce que j’en pense 🙂
Vraiment quel grâce d’être tombé sur vous ! Vos articles sur le savon m ont tout dévoilé une vraie révélation! je regarde maintenant le savon autrement et je peux désormais grâce à tout ce que j’ai appris deviner par quel méthode tel savon ou tel autre savon a été fait
Merci pour ce partage gratuit très riche
Je vais acheter vos formations vous êtes le Prof qu il me faut !!
Bonjour Vanessa,
Merci beaucoup pour ce gentil avis ! Au plaisir de vous retrouver côté formation 🙂